Presse quotidienne

Un lectorat à la baisse

Quatre adultes sur dix (41 %) au Québec lisent régulièrement1 un quotidien (en ligne ou hors ligne) en semaine. Pendant une semaine type complète (7 jours)2, ces journaux rejoignent environ 65 % des Québécois. D’une année à l’autre, les Canadiens sont proportionnellement un peu moins nombreux à s’informer de cette manière, que ce soit du lundi au vendredi (37 %) ou sur l’ensemble de la semaine (63 %).

Tant au Québec qu’au Canada, ces chiffres sont à la baisse depuis 20173. Au-delà de la montée en popularité d’intermédiaires en ligne, tels les réseaux sociaux, pour s’informer, cette baisse survient après une période où l’accès aux contenus des quotidiens était plus facile que jamais. De façon non exhaustive, les dernières années ont vu, au Québec, la disparition du site d’information en ligne HuffPost Québec, la fin des éditions du dimanche du Journal de Québec et du Journal de Montréal ou la disparition des deux quotidiens imprimés gratuits présents dans les transports en commun montréalais (Métro et 24 heures, ce dernier produisant encore des contenus en ligne), alors que les six quotidiens de la coopérative d’information CN2i ont interrompu les sorties papier en semaine et érigé un mur payant pour l’accès à leurs contenus numériques4.

1. Proportion de lecteurs réguliers des quotidiens (lu hier en semaine) et portée (7 jours) en % de la population, Québec et Canada, de 2017 à 2023

Source : Compilation du CEM à partir de Vividata Q3 2017, Hiver 2019, Hiver 2020, Hiver 2021, Hiver 2022, Hiver 2023 et Hiver 2024.

Les données pour l’ensemble du Québec résultent du cumul des réponses à une enquête tenue dans quatre types de marchés : 1) la région métropolitaine de recensement (RMR) de Montréal; 2) la RMR de Québec; 3) les marchés régionaux, soit les autres villes desservies par un quotidien local (les RMR d’Ottawa-Gatineau [partie située au Québec seulement], Sherbrooke, Trois-Rivières et Saguenay, de même que l’agglomération de recensement de Granby) et 4) les « autres marchés », soit ceux qui n’ont pas de quotidien. La moitié (51 %) de la population québécoise habite dans la RMR de Montréal, quelque 10 % dans celle de Québec, 12 % dans les marchés régionaux et 27 % dans les « autres marchés ». Ces derniers incluent toutes les autres agglomérations de recensement, dont les principales sont Drummondville, Saint-Hyacinthe, Rimouski, Shawinigan, Joliette, Victoriaville, Rouyn-Noranda, Sorel-Tracy, Salaberry-de-Valleyfield, mais également Sept-Îles, Matane et bien d’autres encore.

Les résidents des « autres marchés » lisent de manière moins assidue ce type de publications qu’ailleurs au Québec. Cela se vérifie par la tendance à long terme tant au regard des lecteurs réguliers que de la portée. On comprend que l’intérêt de consulter un quotidien est moins grand dans les communautés qui en sont dépourvues. À moins d’un évènement hors de l’ordinaire, ces journaux couvriront peu l’actualité régionale des « autres marchés ». La proportion de lecteurs réguliers de quotidiens en semaine ainsi que la portée sont plus élevées à Québec (44 % et 65 %) et à Montréal (42 % et 64 %), ce qui est sans doute attribuable à la présence de deux quotidiens à Québec et de quatre à Montréal. Quant à l’écart entre Québec et Montréal, qui, sans être très élevé, tend à s’observer d’une enquête à l’autre, il pourrait découler d’un milieu plus populeux et cosmopolite à Montréal. L’importance de la fonction publique à Québec, siège du Parlement provincial, peut aussi être un facteur. 

L’effritement du lectorat constaté à l’échelle du Québec se manifeste dans tous les marchés, bien que pour 2023, les marchés régionaux soient remontés au niveau de 2021.

2. Proportion de lecteurs réguliers des quotidiens (lu hier en semaine) en % de la population, de 2017 à 2023

Source : Compilation du CEM à partir de Vividata Q3 2017, Hiver 2019, Hiver 2020, Hiver 2021 et Hiver 2022, Hiver 2023 et Hiver 2024.

3. Proportion de lecteurs des quotidiens sur l’ensemble de la semaine (7 jours) en % de la population, de 2017 à 2023

Source : Compilation du CEM à partir de Vividata Q3 2017, Hiver 2019, Hiver 2020, Hiver 2021, Hiver 2022, Hiver 2023 et Hiver 2024.

Cette hausse observée entre 2022 et 2023 dans les marchés régionaux ne touche pas l’ensemble des marchés individuels également. Le marché de Gatineau, le plus populeux d’entre eux avec 343 000 habitants, connaît la hausse la plus importante, obtenant du même coup la plus grande part de lecteurs de quotidiens dans sa population adulte. Malgré des indicateurs à la baisse, le marché de Granby, le plus petit à détenir son quotidien (77 000 habitants), fait aussi bonne figure, tout comme celui de Trois-Rivières (138 000 habitants). À l’inverse, les résultats du marché de la ville de Saguenay (135 000 habitants) sont en deçà de ceux des autres marchés, tout comme, mais à un bien moindre degré, ceux de Sherbrooke (193 000 habitants).

4. Proportion de lecteurs réguliers des quotidiens (lu hier en semaine) en % de la population, marchés régionaux, de 2017 à 2023

Source : Compilation du CEM à partir de Vividata Q3 2017, Hiver 2019, Hiver 2020, Hiver 2021, Hiver 2022, Hiver 2023 et Hiver 2024.

5. Proportion de lecteurs des quotidiens sur l’ensemble de la semaine (7 jours) en % de la population, marchés régionaux, de 2017 à 2023

Source : Compilation du CEM à partir de Vividata Q3 2017, Hiver 2019, Hiver 2020, Hiver 2021, Hiver 2022, Hiver 2023 et Hiver 2024.

Le genre et l’âge du lectorat

La propension à consulter des quotidiens varie selon le genre5 et l’âge.

D’une année à l’autre, les hommes sont plus nombreux que les femmes à les lire. Au Québec, en 2023, l’écart est de 19 points de pourcentage en ce qui concerne la fréquentation sur une base régulière (hier en semaine) et de 16 points sur l’ensemble de la semaine. Au Canada, dans les deux cas, l’écart est plutôt d’une dizaine de points de pourcentage.

6. Proportion de lecteurs réguliers des quotidiens (lu hier en semaine) et portée (7 jours) en % de la population, selon le genre, Québec et Canada, 2019 (en haut) et 2023 (en bas)

Source : Compilation du CEM à partir de Vividata Hiver 2020 et Hiver 2024.

Pour ce qui est de l’âge, les Québécois de 18 à 24 ans étaient, d’une année à l’autre, moins susceptibles de lire un quotidien de façon régulière que le reste de la population, alors que les 65 ans et plus l’étaient davantage. Si c’est encore vrai pour les plus âgés, la moitié d’entre eux ayant lu un quotidien la veille (9 pp de plus que l’ensemble de la population) et un peu moins des trois quarts en ayant lu un au cours d’une semaine complète, la fréquence de consultation de ces médias chez les 18 à 24 ans a peu bougé ces dernières années alors qu’elle a beaucoup diminué chez les autres groupes d’âge. Ce faisant, depuis 2022, les jeunes adultes ne se démarquent plus spécifiquement de l’ensemble de la population.

7. Proportion de lecteurs réguliers des quotidiens (lu hier en semaine), au Québec, en % de la population selon les groupes d’âge, de 2017 à 2023

Source : Compilation du CEM à partir de Vividata Q3 2017, Hiver 2019, Hiver 2020, Hiver 2021, Hiver 2022, Hiver 2023 et Hiver 2024.

8. Portée des quotidiens (7 jours) au Québec, en % de la population selon les groupes d’âge, de 2017 à 2023

Source : Compilation du CEM à partir de Vividata Q3 2017, Hiver 2019, Hiver 2020, Hiver 2021, Hiver 2022, Hiver 2023 et Hiver 2024.

Les tranches d’âge retenues par les diverses entreprises qui mesurent la consommation des médias et que nous utilisons dans cette analyse n’ont pas toutes la même importance démographique. Non seulement leur étendue varie (la tranche 18-24 ans regroupe 7 années, la tranche 25-34 ans en regroupe 10, etc.), mais la population ne se répartit pas également entre elles.

Le graphique qui suit illustre l’envergure relative des groupes employés ici, dans la population québécoise âgée de 18 ans et plus d’une part, et au sein des lecteurs réguliers de quotidiens, puis des lecteurs sur l’ensemble de la semaine, d’autre part. On remarque que les 18 à 64 ans regroupent 74 % de la population, mais 69 % des lecteurs réguliers de ces publications, un écart de 5 pp. Inversement, les 65 ans et plus y sont surreprésentés. Ce phénomène s’observe d’une année à l’autre.

Le déséquilibre est moindre au regard de la portée globale. Environ 48 % des lecteurs de quotidien ont moins de 50 ans, soit un seul point au-dessous de leur poids dans la population.

9. Répartition procentuelle de la population, des lecteurs réguliers (lu hier en semaine) et des lecteurs sur 7 jours des quotidiens au Québec selon les groupes d’âge, en 2023

Source : Compilation du CEM à partir de Vividata Hiver 2024.

La composition démographique des différents marchés n’est pas homogène, ce qui a aussi un impact sur la composition du lectorat. La RMR de Montréal est le seul marché de notre analyse où l’on constate un lectorat adulte majoritairement âgé de moins de 50 ans sur l’ensemble de la semaine (51 %). C’est également à Montréal où la part de personnes âgées de 65 ans et plus dans le lectorat est la moins élevée (24 %), bien qu’elle demeure supérieure à son poids réel dans la population adulte de ce marché (23 %). Du côté des marchés régionaux, les personnes de 65 ans et plus y représentent 30 % du lectorat, dans la région de Québec 32 % et au sein des autres marchés 37 %.

10. Répartition procentuelle de la population, des lecteurs sur 7 jours des quotidiens des différentes RMR du Québec selon les groupes d’âge, en 2023

Source : Compilation du CEM à partir de Vividata Hiver 2024.

NADbank, qui évaluait l’achalandage des quotidiens avant 2014, ne compilait aucun résultat de ses enquêtes à l’échelle de la province. L’organisme s’en tenait à chacun des marchés desservis par un quotidien local. Nous vous proposons tout de même un coup d’œil sur ce qui s’est passé pour l’ensemble du Canada6 pendant la période s’étendant de 2001 à 2013 à partir des analyses de NADbank. Nous verrons ensuite pour le marché de Montréal ce qui s’est produit entre 2001 et 2013, puis les résultats des années 2018 et suivantes de son successeur Vividata.

À l’échelle du Canada, le taux de lectorat de ces journaux au sein de la population adulte a diminué de 57 % en 2001 à 48 % en 2013. La baisse de popularité a touché tous les groupes d’âge, mais elle est plus marquée parmi les plus jeunes : ils n’étaient plus que 34 % chez les 18-24 ans à lire régulièrement un quotidien ou à consulter ses déclinaisons numériques en 2013, alors qu’ils étaient 51 % à le faire en 2001.

11. Lecteurs réguliers des quotidiens (lu hier en semaine) dans l’ensemble du Canada selon les groupes d’âge en 2001, en 2005, en 2009 et en 2013*

*Les données pour l’année 2013 tiennent compte de la consultation des sites web des quotidiens et des applications.
Source : Compilation du CEM à partir de NADbank.

À Montréal, où vivent un peu plus de la moitié des Québécois, quelque 52 % de la population adulte consultaient régulièrement un quotidien papier ou ses dérivés numériques en 2013. Ce résultat est analogue à ceux qui avaient été obtenus depuis le début des années 2000. On ne note pas encore de tendance baissière généralisée, contrairement à ce qui se dégageait déjà à l’échelle canadienne7. En fait, la seule ombre au tableau se situait du côté des 18-24 ans, qui n’étaient plus que 38 % à lire de tels journaux, alors qu’ils étaient environ 50 % à le faire dix ans plus tôt. Par contre, la part de lecteurs s’était accrue au sein des 25-34 ans. La percée des 24 heures et Métro au cours de cette période est l’un des facteurs derrière cette bonne performance, tout comme sans doute la stratégie de La Presse axée sur la gratuité en ligne8.

12. Lecteurs réguliers des quotidiens (lu hier en semaine) à Montréal selon les groupes d’âge en 2001, en 2005, en 2009 et en 2013*

*Les données pour l’année 2013 tiennent compte de la consultation des sites web des quotidiens et des applications.
Source : Compilation du CEM à partir de NADbank.

Bien que Vividata ne procède pas selon les mêmes paramètres que son prédécesseur, les bases n’ont pas été modifiées : l’échantillon est établi de manière aléatoire; la question posée est la même, soit « Avez-vous lu ou feuilleté un quotidien hier? »; et le marché de Montréal correspond toujours au territoire de la région métropolitaine de recensement. Qui plus est, le nombre de quotidiens locaux n’a pas changé jusqu’en mars 2021, époque où 24 heures est devenu un magazine hebdomadaire. Nous avons conséquemment regroupé dans un graphique les données des deux dernières années pour lesquelles NADbank était aux commandes avec celles des années 2019, 2020, 2021, 2022 et 2023. Le taux de lectorat à Montréal en semaine (hier) tournait autour de 50 % pendant la période s’étendant de 2001 à 2013, par opposition à 56 % de 2017 à 2019. Mais celui-ci est revenu au palier du 50 % en 2020 et 2021 avant de diminuer bien en dessous en 2022, pour finalement atteindre environ 42 % en 2023. S’il est bien possible que la hausse entre 2013 et 2017 soit strictement attribuable à des changements méthodologiques, ces chiffres laissent tout de même croire que la visibilité de ces journaux ne se serait détériorée que dans un passé récent, alors que l’offre et l’accessibilité diminuent. Pour ce qui est de la consultation par les différents groupes d’âge, ce n’est là encore qu’en 2022 et 2023 que la baisse se généralise aux adultes de l’ensemble des groupes d’âge, à l’exception des 18-24 ans.

13. Lecteurs réguliers des quotidiens (lu hier en semaine) à Montréal selon les groupes d’âge en 2012 et 2013 et de 2017 à 2023

Source : Compilation du CEM à partir des données de NADbank et Vividata Hiver 2019, Hiver 2020, Hiver 2021, Hiver 2022, Hiver 2023 et Hiver 2024.

Revenons aux données de 2023, en premier lieu, pour une comparaison des deux principaux marchés canadiens, Toronto et Montréal, où l’offre est plutôt abondante. Montréal est en effet desservi par quatre quotidiens9, dont un en ligne, alors que Toronto en compte tout autant, tous payants et utilisant encore l’imprimé10. Sur l’ensemble de la population adulte, la proportion de personnes ayant lu un quotidien hier (du lundi au vendredi) et la portée sur les sept jours de la semaine sont plus élevées à Montréal qu’à Toronto. Une analyse selon les groupes d’âge montre que les quotidiens rejoignent une plus grande part des 50 ans et plus à Montréal qu’à Toronto, tandis que les quotidiens sont légèrement plus populaires auprès des 49 ans et moins dans la Ville-Reine. 

14. Lecteurs des quotidiens à Toronto et à Montréal, selon les groupes d’âge en 2023, qui ont lu hier en semaine et portée 7 jours

Source : Compilation du CEM à partir de Vividata Hiver 2024.

Le public des quotidiens québécois

Le Journal de Montréal dépasse tous les autres quotidiens pour ce qui est de la portée. Le Devoir et la Montreal Gazette sont des médias de niche qui, par définition, rejoignent un public plus restreint. Il n’empêche que le premier rejoint près de 1,5 million de lecteurs sur l’ensemble de la semaine. Pour ce qui est des deux publications éditées dans la Capitale-Nationale, Le Journal de Québec rejoint un lectorat plus important que Le Soleil.

Si une moins grande part de la population consulte les contenus des quotidiens en 2023 qu’en 2017, cela ne se manifeste pas par une baisse marquée du lectorat des différents titres de Québec et de Montréal. Cela étant, le lectorat d’ensemble ne croît pas non plus au même rythme que la population. Le Devoir se démarque tout de même avec une hausse de sa portée de 64 % depuis 2017, alors que Le Soleil profite d’une augmentation de 38 %.

15. Comparaison du nombre de lecteurs des principaux quotidiens québécois* sur l’ensemble de la semaine, de 2017 à 2023

*Les mesures sont prises à l’échelle de l’ensemble du Canada. Le 24 heures n’est plus évalué depuis 2019, Métro depuis 2020 et La Presse depuis l’automne 2020.
Source : Compilation du CEM à partir de Vividata, Q3 2017, Hiver 2019, Hiver 2020, Automne 2020 (pour La Presse), Hiver 2021, Hiver 2022, Hiver 2023 et Hiver 2024.

Tous les quotidiens régionaux encaissent des pertes par rapport à leurs performances de 2018 et 2019. Celles-ci atteignent, en 2023, 41 % pour Le Quotidien, 36 % à La Tribune, 31 % au Nouvelliste, 21 % au Droit, et 19 % à La Voix de l’Est. Il faut dire que la stratégie de diffusion de ces journaux, tout comme celle du journal Le Soleil d’ailleurs, s’est transformée radicalement au cours de cette période. Ils ont dit adieu au papier en semaine au premier trimestre de l’année 2020, ont exigé un abonnement payant pour l’accès à la plupart de leurs contenus en ligne à partir de novembre 2020 et, finalement, sont devenus des médias entièrement numériques en décembre 2023.

Selon des données non reprises ici, le recul affecte pratiquement tous les groupes d’âge pour tous les marchés régionaux, bien que des échantillons de petite taille chez les adultes plus jeunes limitent la portée du constat.

16. Comparaison du nombre de lecteurs des quotidiens québécois régionaux sur l’ensemble de la semaine de 2018 à 2023

Source : Compilation du CEM à partir de Vividata Hiver 2019, Hiver 2020, Hiver 2021, Hiver 2022, Hiver 2023 et Hiver 2024. Avant l’enquête Hiver 2019, le lectorat de ces journaux n’était mesuré que dans leur marché respectif. Cela s’est d’ailleurs poursuivi lors de l’Hiver 2019 pour Le Quotidien.

De l’imprimé au numérique

Pour des raisons économiques, les quotidiens délaissent progressivement l’imprimé. Plus aucun quotidien québécois ne publie d’éditions papier tous les jours et La Presse, Métro (dont les activités tant en ligne que hors ligne ont maintenant complètement cessé), 24 heures et les quotidiens régionaux de CN2i n’en publient plus du tout.

La population ne délaissait pas pour autant ce support. En effet, malgré la popularité grandissante des éditions numériques, le papier conservait un certain lectorat jusqu’à ce qu’on impose les contenus en ligne. Un peu plus d’une personne sur cinq (21 %) parmi celles consultant régulièrement des contenus de la presse quotidienne en semaine continuait à ne lire que les versions imprimées de ces publications en 2023, et plus du tiers (34 %) combinait numérique et imprimé.

En 2017, l’imprimé était encore le vecteur utilisé par le plus grand nombre des lecteurs réguliers de 18 ans et plus tant dans le Québec tout entier que dans les marchés de Montréal et de Québec. En 2023, la situation est tout autre, la consommation exclusivement en ligne dépassant maintenant celle reposant uniquement sur le papier : de 24 points de pourcentage (pp) dans l’ensemble de la province, de 17 pp à Montréal et de 29 pp à Québec.

17. Répartition des lecteurs réguliers (lu hier en semaine) de quotidiens selon le support utilisé et les principaux marchés en 2017 et en 2023

Source : Compilation du CEM à partir de Vividata Q3 2017 et Hiver 2024.

Le numérique a également pris le dessus sur l’imprimé dans les marchés régionaux desservis par un quotidien11. Le renversement des habitudes s’est produit en 2018 pour Gatineau et en 2019 pour Granby, mais seulement en 2020 pour Saguenay, Sherbrooke et Trois-Rivières. En 2023, l’écart en faveur de la consultation numérique des quotidiens est de 6 points à Gatineau, de 30 points à Trois-Rivières, d’environ 55 points à Saguenay et à Granby et de 60 points à Sherbrooke. Pour ce qui est des « autres marchés » du Québec, soit ceux qui ne sont pas desservis directement par un quotidien, cet écart est de 36 points, là encore en faveur du numérique. 

18. Répartition des lecteurs réguliers (lu hier en semaine) de quotidiens selon le support utilisé et les marchés en 2018 et en 2023

Source : Compilation du CEM à partir de Vividata Hiver 2019 et Hiver 2024.

C’est en 2020 que le numérique a supplanté l’imprimé dans le marché de Toronto ainsi qu’à l’échelle du Canada, alors que le mouvement vers des éditions strictement en ligne avait déjà débuté dans l’industrie. L’écart en faveur de la consultation numérique ne fait qu’augmenter depuis.

19. Répartition des lecteurs réguliers (lu hier en semaine) de quotidiens selon le support utilisé au Québec, au Canada, à Montréal et à Toronto en 2018 et en 2023

Source : Compilation du CEM à partir de Vividata Hiver 2019 et Hiver 2024.

L’âge des lecteurs numériques

Jusqu’en 2019 environ, le format papier et le format numérique avaient une part similaire d’adeptes parmi les 50 ans et plus. Les contenus numériques des quotidiens rejoignent un plus large public auprès de toutes les tranches d’âge, sans aucun doute aidés par l’offre réduite de journaux imprimés. Malgré son attrait, 29 % des lecteurs réguliers sur semaine de quotidiens âgés de 65 ans et plus continuent de lire leur journal uniquement en version imprimée, alors que c’est le cas de moins de 20 % de ceux des autres tranches d’âge. Les plus âgés sont aussi moins portés à combiner le papier et le numérique que les plus jeunes, se contentant d’un seul mode de consultation.

20. Répartition des lecteurs réguliers (lu hier en semaine) de quotidiens au Québec selon le support utilisé et les groupes d’âge en 2023

Source : Compilation du CEM à partir de Vividata Hiver 2024.

Lorsqu’on s’attarde uniquement à la proportion de lecteurs réguliers en semaine qui ne consultent que les contenus en ligne des quotidiens, on remarque qu’elle a gagné 12 points de pourcentage depuis 2017. Ce mouvement s’explique entièrement par un transfert des 35 ans et plus vers le numérique, les chiffres des 18 à 34 ans montrant plutôt une légère baisse de la part de lecteurs strictement numériques.

21. Proportion de lecteurs réguliers (lu hier en semaine) de quotidiens au Québec qui n’utilisent que le numérique selon les groupes d’âge en 2017, en 2022 et en 2023

Source : Compilation du CEM à partir de Vividata Q3 2017, Hiver 2023 et Hiver 2024.

Poursuivons la comparaison amorcée plus tôt entre Montréal et Toronto, cette fois au regard de la popularité de la lecture en ligne. Les habitudes d’un bon nombre de Torontois ont aussi changé depuis six ans. En 2017, 49 % des lecteurs réguliers en semaine de ce marché utilisaient exclusivement l’imprimé. Cette proportion a chuté de 18 pp pour atteindre 31 % en 2023, si bien que les contenus en ligne mènent maintenant par 6 pp. Le numérique y surpasse dorénavant de façon marquée l’imprimé chez les moins de 65 ans, alors que celui-ci conserve une avance de 15 points auprès des 65 ans et plus. À Montréal, tant l’usage exclusif de la presse numérique (40 %) que la combinaison imprimée et numérique (37 %) sont plus fréquents qu’à Toronto (respectivement 37 % et 33 %). Le numérique domine par 17 pp dans le marché montréalais. Et contrairement à ce qu’on retrouve à Toronto, cette façon de consulter les contenus prévaut au sein de toutes les tranches d’âge.

22. Répartition des lecteurs réguliers (lu hier en semaine) de quotidiens à Toronto et à Montréal selon le support et les groupes d’âge en 2023

Source : Compilation du CEM à partir de Vividata Hiver 2024.

Les modes d’accès vers les quotidiens numériques

Les appareils pour accéder aux contenus des journaux en ligne sont principalement l’ordinateur, la tablette et le téléphone intelligent.  Le premier graphique compare d’une part, les usages au Québec et au Canada et d’autre part, les usages à Montréal et à Toronto. On y constate que l’ordinateur et le téléphone intelligent sont, presque à égalité, les deux modes d’accès les plus répandus au pays et dans la Belle Province. Toutefois, l’ordinateur est légèrement préféré au téléphone intelligent à Montréal et à Toronto. La tablette, pour sa part, est utilisée par une plus grande part de lecteurs au Québec qu’ailleurs au pays. L’utilisation d’autres types d’appareils connectés (montre, téléviseur) demeure marginale.

23. Proportion de lecteurs numériques de quotidiens au Canada, au Québec, à Montréal et à Toronto selon le mode d’accès, ensemble de la semaine, 18 ans et +, 2023

Source : Compilation du CEM à partir de Vividata Hiver 2024.

L’utilisation de l’ordinateur, de la tablette et du téléphone intelligent a fortement augmenté en 2020 et 2021, années de pandémie mondiale. Cette hausse peut s’expliquer en partie par un intérêt plus prononcé de la population québécoise pour l’actualité entourant la Covid-19 et par les changements aux habitudes qu’ont pu entraîner les différentes mesures de santé publique prises alors. Durant cette période, le téléphone intelligent a même dépassé pour la première fois l’ordinateur comme appareil le plus utilisé pour lire des contenus de quotidiens avant de légèrement retraiter en 2022. L’utilisation de la tablette pour consulter les quotidiens est aussi moins répandue qu’en 2020 et 2021. Ainsi, 44 % des lecteurs numériques au Québec l’utilisaient en 2020 contre 33 % en 2023, une diminution de 11 points de pourcentage.

24. Proportion de lecteurs numériques de quotidiens au Québec selon le mode d’accès, ensemble de la semaine, 18 ans et +, de 2017 à 2023

Source : Compilation du CEM à partir de Vividata Q3 2017, Hiver 2019, Hiver 2020, Hiver 2021, Hiver 2022, Hiver 2023 et Hiver 2024.

Contrairement aux lecteurs numériques de Montréal et de Toronto, ceux de la RMR de Québec et des marchés régionaux où des quotidiens sont établis, privilégient le téléphone intelligent pour accéder à un quotidien. Les lecteurs des marchés qui ne sont pas directement desservis par un quotidien sont plus partagés : 50 % d’entre eux utilisent l’ordinateur et 48 % emploient le téléphone intelligent. L’usage d’une tablette est également moins répandu dans ces régions que l’ordinateur ou le téléphone intelligent. La tablette semble légèrement plus utilisée dans les RMR de Montréal (35 %) et de Québec (34 %) que dans les marchés régionaux (31 %) ou les autres marchés (27 %) de la province.

25. Proportion de lecteurs numériques de quotidiens à Québec, dans les marchés régionaux et les autres marchés du Québec selon le mode d’accès, ensemble de la semaine, 18 ans et +, 2023

Source : Compilation du CEM à partir de Vividata Hiver 2024.

Avant toute analyse reposant sur l’âge, il faut rappeler que la possession d’un appareil électronique varie en fonction de cette variable. En effet, les plus âgés (et particulièrement les 75 ans et plus) ont moins tendance à détenir des appareils électroniques que les plus jeunes12. Lorsqu’il est question de l’accès aux contenus des quotidiens, une part plus importante des adultes de moins de 50 ans emploient le téléphone intelligent. L’ordinateur, quant à lui, est plus populaire auprès des 50 ans et plus. À noter que le téléphone intelligent est le mode d’accès le moins utilisé chez les 65 ans et plus, seul groupe à y privilégier la tablette.

26. Proportion de lecteurs numériques de quotidiens au Québec selon le mode d’accès et les groupes d’âge, ensemble de la semaine, 2023

Source : Compilation du CEM à partir de Vividata Hiver 2024.

 

Mise à jour : décembre 2024

Notes

[1] Proportion d’adultes ayant lu ou feuilleté au moins une édition imprimée ou numérique hier, du lundi au vendredi. Nous utilisons les données suivantes de Vividata dont les enquêtes ont eu lieu sur les périodes de 12 mois mentionnées ci-après : Hiver 2024 = d’octobre 2022 à septembre 2023; Hiver 2023 = d’octobre 2021 à septembre 2022; Hiver 2022 = d’octobre 2020 à septembre 2021; Hiver 2021 = d’octobre 2019 à septembre 2020; Hiver 2020 = de juillet à décembre 2018 ainsi que d’avril à septembre 2019 ; Hiver 2019 = d’octobre 2017 à septembre 2018; Q3 2017 = d’octobre 2016 à septembre 2017.

[2] Proportion d’adultes ayant lu ou feuilleté au moins un journal en format imprimé ou numérique au cours d’une semaine complète (7 jours). Cet indicateur est connu comme la portée.

[3] Les données que nous utilisons sont tirées d’enquêtes menées par Vividata, née de la fusion en 2014 de NADbank et de PMB. La méthode de collecte ayant été substantiellement modifiée en 2019, il faut faire preuve d’une grande prudence au moment de comparer les résultats. Par ailleurs, les chiffres antérieurs à 2017 sont à titre indicatif seulement en raison de changements majeurs apportés à la façon de mesurer le lectorat.

[4] Ceux-ci n’existent maintenant plus qu’en ligne depuis décembre 2023.

[5] Les données ne permettent pas une catégorisation non binaire de l’identité de genre.

[6] NADbank ne compilait pas de résultats sur la base de la province.

[7] Pour l’ensemble du Canada, le lectorat a diminué de neuf points de pourcentage entre 2001 et 2013 (de 57 % à 48 %) selon les données de NADbank. La baisse a affecté toutes les tranches d’âge, à l’exception des 65 ans et plus.  

[8] L’application pour tablettes La Presse + a été lancée, en accès libre, en avril 2013.  

[9] Il s’agit du Journal de Montréal, du Devoir, de La Presse et de la Montreal Gazette. Métro a cessé complètement ses activités en août 2023. Le gratuit 24 heures est devenu un magazine hebdomadaire en février 2021, avant de passer uniquement aux contenus web en mars 2023.

[10] Il s’agit du National Post, du Globe and Mail, du Toronto Star et du Toronto Sun. Le gratuit StarMetro a cessé ses activités en décembre 2019, ce qui est antérieur à la période couverte par le sondage Hiver 2021 dont nous utilisons ici les données.

[11] Contrairement à la figure précédente, il s’agit des années 2018 et 2023, puisque nous n’avons pas les données des marchés régionaux pour 2017.

[12] Académie de la transformation du numérique, « NETendances – Portrait numérique des foyers québécois », ATN, 2023, p. 10.