Au Québec
Les recettes publicitaires des quotidiens du Québec ont atteint 165 millions en 20201. Elles totalisaient 389 millions en 2014. Cette source de revenus s’est donc dégradée de 58 % en six ans. Or, pendant cette période, le produit intérieur brut (PIB) s’est accru de 5,4 %2 et l’Indice des prix à la consommation (IPC) de 5 %3.
En ce qui concerne les rentrées provenant de la diffusion (abonnements, ventes au numéro ou à l’article), elles s’élèvent à 77 millions de dollars en 2020, ce qui marque une baisse de 49 % par rapport à 2014.
Depuis 2003, le PIB a augmenté de 24,4 % et l’IPC de 29,6 %, pendant que les revenus combinés tirés des annonceurs et de l’auditoire ont fondu de 64 %. Les quotidiens du Québec comme ceux ailleurs au Canada sont durement touchés par les changements dans les pratiques des publicitaires et des lecteurs survenus dans la foulée de la prolifération des ordinateurs, des tablettes et des téléphones intelligents.
1. Revenus des quotidiens au Québec
Les quotidiens n’obtiennent plus que 7 % des dépenses des annonceurs. Les plateformes numériques non médiatiques et la télévision les devancent largement en recueillant, respectivement, 59 %4 et 21 % des sommes investies en publicité au Québec. Les stations de radio les dépassent également. Leur part atteint 9 %. Celle-ci est toutefois plutôt stable, alors que celle des quotidiens faiblit.
En ce qui a trait à la marge bénéficiaire, la donnée concerne différents types de publications, soit les quotidiens et ce que Statistique Canada appelle « les journaux communautaires généraux et spécialisés »5. Cette marge est redevenue positive à 11,7 % en 2020 après une période de pertes : -6,5 % en 2018 et -0,2 % en 2016.
2. Évolution de la marge bénéficiaire d’exploitation des journaux (quotidiens et hebdomadaires) au Québec de 1999 à 2020
Au Canada
3. Revenus des quotidiens au Canada
Les annonceurs dépensent de moins en moins d’argent dans les quotidiens. La décroissance atteint 63 % au cours des cinq dernières années et 79 % pour la période s’étendant de 2003 à 2020. Même les publications numériques ont perdu du terrain auprès d’eux en 2020 (-29 % par rapport à 2018). La contribution des lecteurs s’amenuise elle aussi. Elle a baissé de 21 % depuis 2014. Malgré cela, pour la première fois, cet apport dépasse celui de la publicité.
Selon Médias d’Info Canada, 64 % des rentrées publicitaires sont attribuables aux imprimés, ce qui laisse 36 % pour les nouveaux supports. De leur côté, les données de Statistique Canada montrent que ce sont les annonceurs locaux qui achètent le plus d’espace dans les éditions papier. En incluant les petites annonces, ils sont responsables de deux tiers de ces revenus.
Pour ce qui est des recettes découlant des ventes auprès de lecteurs, les éditions numériques n’en représentent que 12 %.
S’agissant des dépenses, Statistique Canada ne les répartit entre le papier et le numérique que pour l’ensemble des journaux. Ce dernier mode y engendre 11 % des déboursés.
Au regard du rendement, notons que les marges bénéficiaires sont généralement plus élevées au Canada qu’à l’échelle québécoise. Ainsi, les journaux canadiens ont toujours été rentables, bien que cette profitabilité ait beaucoup faibli depuis 2016.
4. Évolution de la marge bénéficiaire d’exploitation des journaux (quotidiens et hebdomadaires) au Canada de 1999 à 2020
La situation n’est guère plus reluisante aux États-Unis : le Pew Research Center évalue que les revenus des quotidiens cotés en bourse attribuables aux annonceurs ont chuté de 53 % de 2015 à 2020. Le numérique en représente 39 %, et, bien que ce type de recettes soit en hausse, cette hausse est plus faible que la baisse subie par l’imprimé. L’effondrement de la publicité fait en sorte que la diffusion (abonnements, ventes au numéro ou à l’article), qui n’a augmenté que de 2 %, devient, pour la première fois, la principale entrée de fonds de ces publications.
Pour l’ensemble de la planète, l’Association mondiale des journaux indique que les rentrées publicitaires ont diminué de 29 % pendant la même période. Environ 73 % de ces sommes découlent des éditions papier. Or, ces recettes attribuables aux imprimés ont dégringolé de 39 % pendant ces cinq années. Pour leur part, les sommes provenant du numérique se sont accrues de 34 %, mais elles ne représentent toujours que 27 % des revenus publicitaires. La diffusion rapporte elle aussi moins de dollars. Son apport s’est amenuisé de 12 %. On remarque une augmentation du côté du numérique, mais elle est bien insuffisante pour combler les pertes pour les éditions papier. Fait à noter, à l’échelle mondiale, la diffusion fait entrer davantage d’argent dans les poches des quotidiens que la publicité. C’était vrai en 2013, ce l’est encore plus en 2020.
Mise à jour : mai 2022
Notes
[1] Nous utilisons les données de Statistique Canada qui mène des enquêtes auprès de l’industrie. Depuis 2010, celles-ci n’ont lieu que les années paires. Pour les années impaires, nous faisons des projections à partir des données canadiennes publiées par Think TV et provenant de Médias d’Info Canada. Cette source ne rapporte aucun résultat sur une base provinciale. Pour les années impaires, les variations constatées dans les données canadiennes de Médias d’Info Canada ont été appliquées aux données de Statistique Canada des années paires.↑
[2] Le PIB du Québec a reculé de 5,5 % en 2020 par rapport à l’année précédente en raison du confinement. ↑
[3] Institut de la statistique du Québec, Produit intérieur brut réel, Québec, 1981-2020, https://statistique.quebec.ca/fr/document/comptes-economiques-des-revenus-et-depenses-du-quebec-annuels/tableau/produit-interieur-brut-reel-quebec ; Indice des prix à la consommation : https://statistique.quebec.ca/fr/document/indice-prix-consommation-ipc/tableau/indice-des-prix-a-la-consommation-ipc-indice-ensemble-canada-quebec-rmr-montreal-quebec-moyennes-annuelles ↑
[4] Pour l’ensemble du Canada, cette proportion grimpe à 66 %, ce qui ne laisse qu’une tranche de 4 % aux quotidiens. ↑
[5] Ce groupe comprend les hebdomadaires régionaux, d’autres titres régionaux dont les parutions sont plus espacées ainsi que les journaux universitaires, ethniques et religieux. ↑